Quand les ENR affrontent l’hiver !

La revue des énergies renouvelables et des solutions alternatives.

Jean Louis Bal
Président du SER

Face à la vague de froid qui a traversé la France courant du mois de janvier les ENR ont prouvés leur efficacité, 19% de la consommation électrique provient de ce cycle, pouvez-vous nous confirmer cela ?

Eléments de réponse

Les énergies renouvelables on en effet participé à couvrir la demande en électricité à hauteur de 19,6% en moyenne sur l’année 2016.

Si on choisit une filière en particulier ou une période donnée le taux de couverture peut changer :

  • A un instant donné, ni la production renouvelable, ni la consommation ne sont égales à leur valeur moyenne annuelle (les mois de janvier et février sont généralement les mois où la consommation est la plus élevée) ;

  • Le profil de production est différent pour chaque filière (le PV produit plus en été et jamais la nuit, l’hydraulique produit généralement plus en hiver et au printemps).

Ainsi, pour revenir à la question posée, nous pouvons étudier les données publiées par RTE (données non consolidées) concernant le mois de janvier 2017. Une étude sommaire portant sur le calcul des taux de couverture par filière et par période permet de tirer quelques enseignements :

  • les filières renouvelables sont regroupées sous 4 catégories : éolien, solaire, hydraulique et bioénergies ;

  • les périodes considérées sont : toutes les heures du mois de janvier, les heures comprises entre 10 et 13h correspondant à la pointe de mi-journée, les heures comprises entre 18 et 20h correspondant à la pointe de début de soirée ou pointe dite de 19h.

 

Tc (%)

Eolien

Solaire

Hydraulique

Bioénergies

Total

Janvier

3,4

0,6

9,4

1,0

14,5

10-13h

2,7

2,2

10,9

1,0

16,8

18-20h

3,4

0,0

12,6

1,0

17,0

 

Tableau 1 : Taux de couverture de la consommation par les filières renouvelables en moyenne sur le mois de janvier 2017, en moyenne aux heures de pointe de la mi-journée sur le mois de janvier 2017, et en moyenne aux heures de pointe du début de soirée sur le mois de janvier 2017

Pour permettre une lecture plus éclairée, un tableau comparant les productions et consommations enregistrées les années précédentes sur la même période est proposé :

Evolutions annuelles

janv-15

janv-16

janv-17

Eolien (MWh)

2 299 500

2 827 105

1 908 181

Solaire (MWh)

251 856

265 607

368 712

Hydrau. Ren. (MWh)

5 761 487

5 179 730

5 354 930

Bioénergie Ren. (MWh)

527 799

571 154

597 647

Total Prod. EnR (MWh)

8 840 642

8 843 595

8 229 470

Consommation (MWh)

52 476 151

49 999 050

56 945 550

Tc total (%)

16,8

17,7

14,5

Tableau 2 : Consommation et production renouvelable par filière sur les mois de janvier 215, 2016 et 2017 (MWh)

A la lecture de ces tableaux, un certain nombre d’observations peuvent être faites.

Du point de vue général

Les EnR ont couvert 19,6% de la consommation en moyenne sur l’année 2016 et 14,5% en janvier 2017. En se reportant au tableau n°2 on constate que cette performance mensuelle est moins bonne que celle de l’année précédente. Deux facteurs principaux expliquent cet écart :

  • une consommation en forte hausse par rapport au mois de janvier des années précédentes (+14% par rapport à janvier 2016) ;

  • une production éolienne en retrait par rapport aux performances observées les années précédentes.

Par ailleurs, la production renouvelable couvre 16,8% de la consommation en moyenne sur les périodes de pointe de consommation à la mi-journée, et 17% pour les périodes de pointe de début de soirée. La contribution globale des énergies renouvelables à la couverture de la consommation est meilleure pendant les heures de pointe qu’en moyenne sur le mois.

Le cas de l’éolien

Les conditions météorologiques du mois de janvier n’ont pas été très clémentes en termes de productible éolien au mois de janvier dernier. Le taux de couverture moyen annuel de la consommation par la filière en 2016 a été de 4,3% et de 3,4% en janvier 2017.

Cependant, si on analyse le taux de couverture éolien aux heures de pointes (3,4%), on note que l’éolien contribue autant à la couverture de la consommation lors de la pointe de 19h qu’en moyenne sur le mois. Il contribue en moyenne moins (2,7%) à la couverture de la pointe de mi-journée.

Le cas du solaire

La production photovoltaïque a crû chaque année sur la période du mois de janvier entre 2015 et 2017. En janvier 2017 l’énergie solaire couvre 0,6% de la consommation électrique en moyenne contre 1,7% en moyenne sur l’année 2016. On retrouve bien ici le profil saisonnier de production solaire.

Pour autant, la contribution de l’énergie solaire aux pointes de consommation est meilleure que le chiffre moyen. Le solaire, s’il ne participe pas du tout à couvrir la pointe de 19h en ce mois d’hiver, couvre 2,2% de la consommation lors de la pointe de la mi-journée en moyenne sur le mois de janvier.

Le cas de l’hydraulique

Le parc hydraulique a permis de couvrir 12,3% de la consommation électrique en moyenne pendant l’année 2016. Au mois de janvier, l’énergie hydraulique a couvert en moyenne 9,3% de la consommation. En se reportant aux performances observées les années précédentes, on constate que cette baisse de la couverture de la consommation est bien la conjonction ici d’une baisse de production moyenne associée à une augmentation de la consommation moyenne sur le mois.

Si maintenant on s’attarde sur le rôle de la filière durant les périodes de pointe, on constate que la production hydraulique est nettement plus élevée lors des pointes, et plus encore lors de la pointe de début de soirée, à 19h.

Le cas des bioénergies

Les bioénergies ont produit relativement plus que les années précédentes en ce mois de janvier. La filière contribue autant en période de pointe qu’en moyenne sur le mois, c’est-à-dire à hauteur de 1% de la consommation électrique, et représente donc un approvisionnement stable en cette période de l’année.

Conclusion

Toutes les énergies renouvelables ne possèdent pas le même profil de production, et ne sont pas à l’heure actuelle toutes aussi modulables.

Pour autant plusieurs types de complémentarité apparaissent lorsqu’on se penche sur les statistiques de production et de consommation.

Les bioénergies produisent un soutien prévisible et stable tout au long de la période. La production éolienne, si elle n’atteint pas des records en ce mois de janvier, participe statistiquement autant à la pointe du soir que le reste du temps à la couverture de la consommation. L’énergie solaire, elle, contribue plus à la couverture de la pointe de la mi-journée. Cette contribution participe à la réduction des besoins sur cette période et incite donc les capacités hydrauliques modulables (centrales lacs) à turbiner moins en milieu de journée. Les capacités hydrauliques participent plus aux heures de pointes, et d’autant plus lors de la pointe de début de soirée.

Les énergies renouvelables ne sont pas toutes modulables, mais leurs profils de production peuvent être soit complémentaire de celui de la consommation, soit complémentaires entre filières. Cette lecture très succincte des données permet de mettre en évidence que la contribution des énergies renouvelables durant les heures de pointes n’est pas moins bonne aux heures de pointes qu’en moyenne sur le mois de janvier, et fait de plus apparaître des complémentarités bénéfiques à l’équilibre du système en moyenne sur ce mois d’hiver.